LA CASE DE L'ONCLE TOM
ARTICLE DE ROLAND ROTH
LA CASE DE L’ONCLE TOM. (Uncle Tom's Cabin)
En décembre 1852, le mouvement antiesclavagiste a trouvé une porte-parole idéale en la personne d’une romancière et écrivaine américaine débutante Harriet Elisabeth Beecher-Stowe âgée de 39 ans.
Harriet Beecher est née à Litchfield dans le Connecticut le 14 juin 1811.
Elle est la fille du prédicateur et penseur calviniste Lyman Beecher et l’épouse d’un de ses disciples C. E. Stowe.
Harriet s'est inscrite au Hartford Female Seminary dirigé par sa sœur aînée Catharine où elle a reçu une éducation académique traditionnelle avec une concentration sur les classiques, les langues et les mathématiques.
Elle était une abolitionniste convaincue.
Harriet Stowe écrit le roman « La case de l’oncle Tom » en réponse à l'adoption en 1850 du « second Fugitive Slave Act » qui entend punir ceux qui aident les esclaves fugitifs en diminuant leurs droits ainsi que ceux des esclaves libérés.
Harriet Stowe affirma également avoir fondé son livre sur des entretiens avec des esclaves fugitifs rencontrés lorsqu'elle vivait à Cincinnati dans l'Ohio, ville proche du Kentucky qui était alors un état esclavagiste.
La majeure partie du livre est écrite à Brunswick dans le Maine où le mari de Harriet, Calvin Ellis Stowe, enseigne au Bowdoin College.
L’autrice a suscité un débat passionné en publiant « La case de l’oncle Tom » ou « La vie des humbles », une histoire tragique, avec au centre de son roman le personnage de l'oncle Tom, un esclave noir patient et tolérant, pieux et généreux qui sauve une jeune fille blanche.
Malgré ce geste, il est vendu à un maître sadique Simon Legree qui est exaspéré par les vertus chrétiennes et la force d’âme de Tom qu’il décide de faire fouetter à mort.
Tout au long du roman, bien loin de se laisser exploiter, Tom défend ses croyances et il est même admiré à contrecœur par ses ennemis. Ce roman sentimental dépeint la réalité de l'esclavage tout en affirmant que l'amour chrétien peut surmonter une épreuve aussi destructrice que l'esclavage d'êtres humains.
L’histoire est parue d’abord en feuilleton de 40 épisodes dans le « National Era », un journal abolitionniste, à partir du 5 juin 1851 qui lui vaut le succès immédiat.
Au vu de la popularité de l'histoire, l'éditeur John Jewett propose à Harriet Stowe de transformer le feuilleton en roman pour une publication en volume.
Bien que Harriet Stowe n'était pas du tout certaine que « La Case de l'oncle Tom » serait lu une fois publié en volume, elle consentit finalement à cette requête.
Convaincu que le livre serait aimé par le public, Jewett prend la décision de faire graver pour la première édition six illustrations pleine page par Hammatt Billings.
Publié en volume le 20 mars 1852 pour 37,5 cents/pièce, le roman est bientôt épuisé et d'autres éditions sont imprimées peu après (en particulier une édition de luxe en 1853 comptant 117 illustrations de Hammatt Billings).
Dans l'année suivant sa parution, ses ventes ont atteint le chiffre record de 300 000 exemplaires.
Harriet Stowe
La « Case de l'oncle Tom » est le roman le plus vendu du 19ème siècle et le second livre le plus vendu de ce même siècle derrière la Bible.
Le livre est traduit dans de nombreuses langues.
Le roman eut un profond impact sur l'état d'esprit général vis-à-vis des Afro-Américains et de l'esclavage aux États-Unis et il est un des facteurs de l’exacerbation des tensions qui menèrent à la Guerre de Sécession.
L'impact du roman est tel qu'on attribue à Abraham Lincoln ces mots prononcés lorsqu'il rencontre Harriet Stowe au début de la guerre de Sécession : « C'est donc cette petite dame qui est responsable de cette grande guerre ».
Pour écrire « La Case de l'oncle Tom », Harriet Stowe s'inspire en partie de l'autobiographie de Josiah Henson, un Noir qui vécut et travailla dans une plantation de tabac de 15 km² appartenant à Isaac Riley et située à North Bethesda dans le Maryland.
Josiah Henson échappe à l'esclavage en 1830 en s'enfuyant dans la province du Haut-Canada, l’actuel Ontario, où il aida d'autres esclaves à s'échapper et à devenir autonomes. Il y écrivit ses mémoires.
Lorsque l'œuvre de Harriet Stowe devint célèbre, Henson publia à nouveau ses mémoires sous le titre « Les Mémoires de l'oncle Tom » et voyagea aux États-Unis et en Europe.
« La Case de l'oncle Tom » fut le premier roman à teneur politique à être lu par un grand nombre de personnes aux États-Unis.
Dès sa publication, « La Case de l'oncle Tom » indigne les habitants du Sud des Etats-Unis.
L'écrivain sudiste William Gilmore Simms déclara que le livre était entièrement faux, tandis que d'autres qualifièrent le roman de criminel et diffamatoire.
En réponse à « La Case de l'oncle Tom », certains écrivains du Sud des États-Unis produisirent des livres destinés à combattre le roman de Harriet Stowe.
Parmi les plus célèbres livres anti-Tom se trouvent « The Sword and the Distaff » de William Gilmore Simms, « Aunt Phillis's Cabin » de Mary Henderson Eastman et « The Planter's Northern Bride » de Caroline Lee Hentz, cette dernière ayant été une amie proche de Harriet Stowe lorsqu’elles vivaient toutes les deux à Cincinnati.
Le 27 septembre 1852, une version théâtrale a été présentée à Troy dans l’Etat de New York par George Aiken sans autorisation préalable de l’autrice.
La pièce a tenu l’affiche pendant des mois avant de faire un triomphe au National Theater de New York.
La case de l'oncle Tom a été traduit en français pour la première parution, par Émile de La Bédollière : La Case du père Tom ou Vie des nègres en Amérique, Barba, 1852.
Émile de La Bédollière
Entre 1852 et 1856, « La Case de l'Oncle Tom » n'eut pas moins de huit traductions différentes en français et dix-neuf éditions.
Le roman de Harriet Stowe a donné son nom à la demeure de Josiah Henson, devenue Uncle Tom's Cabin Historic Site, près de Dresden dans l’Ontario et transformée en musée depuis les années 1940.
La véritable cabane dans laquelle Josiah Henson vécut lorsqu'il était esclave existe toujours dans le comté de Montgomery dans le Maryland.
JOSIAH HENSON
Josiah Henson, né le 15 juin 1789 dans le comté de Charles et mort le 5 mai 1883 à Dresden, est un auteur abolitionniste et un ministre américano-canadien.
Né en esclavage dans le village de Port Tobacco Village au Maryland, il se réfugie dans le Haut-Canada (actuel Ontario) en 1830 et fonde à Dawn, près de Dresden dans le comté de Kent, une colonie et une école ouvrière pour d'autres esclaves fugitifs.
L'autobiographie de Henson est un récit d'esclave nommé « The Life of Josiah Henson, Formerly a Slave, Now an Inhabitant of Canada, as Narrated by Himself » (1849), qui aurait inspiré le personnage principal de « La Case de l'oncle Tom » d' Harriet Beecher Stowe. Après le succès du roman de Harriet Stowe, Josiah Henson publie une version améliorée de ses mémoires, « Truth Stranger Than Fiction. Father Henson's Story of His Own Life (1858) ».
Près de deux décennies plus tard, son histoire de sa vie est encore mise à jour et publiée sous le titre de « Uncle Tom's Story of His Life: An Autobiography of the Rev. Josiah Henson (1876) ».
RESUME DE L’HISTOIRE DE L’ONCLE TOM
Au 19ème siècle, dans le Kentucky sudiste, George Shelby, riche planteur et son épouse Emily, traitent leurs esclaves avec bonté.
Mais le couple craint de perdre la plantation pour cause de dettes et décide alors de vendre deux de leurs esclaves : Oncle Tom, un homme d'âge moyen ayant une épouse et des enfants et Henri, le fils d'Elisa, la servante d'Emily.
Cette idée répugne à Emily qui avait promis à sa servante que son fils ne serait jamais vendu et le mari d'Emily, George Shelby, ne souhaite pas voir partir Tom qu'il considère comme un ami et un mentor.
Lorsqu' Elisa surprend Mr et Mme Shelby en train de discuter de la vente prochaine de Tom et Henri, elle décide de s'enfuir avec son fils.
Elisa part le soir même, laissant un mot d'excuse à sa maîtresse.
Pendant ce temps, Oncle Tom est vendu à Augustin St. Clare et embarque sur un bateau qui s'apprête à descendre le Mississippi.
À bord, Tom rencontre une jeune fille blanche nommée Evangeline (Eva) qui est la fille de son maître et se lie d'amitié avec elle.
Lorsque Eva tombe à l'eau, Tom la sauve.
Pour le remercier, le père d'Eva lui donne des biscuits.
La famille d'Elisa est pourchassée, tandis que Tom vit chez les St. Clare.
Deux ans après que Tom fut arrivé chez les St. Clare, Eva tombe gravement malade. Avant de mourir, elle a une vision du paradis qu'elle partage avec les personnes qui l'entourent.
En conséquence de cette vision et de la mort d'Eva, Augustin St. Clare décide d'affranchir l'oncle Tom.
Augustin St. Clare est poignardé en entrant dans une taverne de La Nouvelle-Orléans et meurt avant de pouvoir tenir sa promesse.
Sa femme revient sur la promesse de son mari décédé et vend Tom aux enchères à un propriétaire malveillant nommé Simon Legree.
Simon Legree, originaire du nord, emmène Tom dans une région rurale de la Louisiane où Tom fait la connaissance des autres esclaves de Legree et en particulier d'Emmeline que Legree a achetée en même temps que Tom.
La haine de Legree pour Tom naît lorsque celui-ci refuse son ordre de fouetter un autre esclave.
Legree bat sauvagement Tom et décide de broyer la foi en Dieu de son nouvel esclave.
Cependant, malgré la cruauté de Legree, Tom refuse de cesser de lire sa Bible et de réconforter les autres esclaves.
À la plantation, Tom rencontre Cassy, une autre esclave de Legree, qui a été séparée de son fils et de sa fille lorsque ceux-ci ont été vendus.
En Louisiane, l'oncle Tom succombe presque au désespoir alors que sa foi en Dieu est mise à l'épreuve par les rigueurs de la plantation.
Il a cependant deux visions, une de Jésus et une d'Eva, qui renouvellent sa détermination à rester un chrétien fidèle, même si sa vie est en jeu.
Il encourage Cassy à s'enfuir, ce qu'elle fait en emmenant Emmeline avec elle.
Lorsque Tom refuse de révéler à Legree leur destination, ce dernier ordonne à ses employés de tuer Tom.
Alors qu'il est mourant, Tom pardonne aux employés de l'avoir battu.
Impressionnés par la personnalité de l'homme qu'ils ont tué, les deux hommes deviennent chrétiens.
Juste avant la mort de Tom, Georges Shelby, le fils d'Arthur Shelby (le maître original de Tom), apparaît pour acheter la liberté de Tom, mais se rend compte qu'il arrive trop tard.
Sur le bateau qui les emmène vers la liberté, Cassy et Lucy rencontrent la sœur de Georges Harris et l'accompagnent au Canada.
Une fois arrivée, Cassy découvre qu'Elisa est sa fille qui avait été vendue enfant et dont elle n'avait pas eu de nouvelles depuis.
Leur famille enfin reconstituée, elles partent pour la France puis finalement pour le Liberia, nation africaine créée pour les anciens esclaves d'Amérique où elles retrouvent le fils de Cassy, également perdu de vue depuis longtemps.
Georges Shelby retourne dans sa plantation du Kentucky et libère tous ses esclaves en leur disant de se souvenir du sacrifice de Tom et de sa foi dans la véritable signification du christianisme.
Maison de l'oncle Tom Maison de Josiah Henson Maison de Harriet Stowe
Date de dernière mise à jour : 24/09/2024